25 août, 2020

PORTRAIT DE FORESTIER #5 Daniel Soupe

Apôtre de la bio-dynamisation

Le pépiniériste Daniel Soupe se présente comme le pionnier de la bio-dynamisation contrôlée appliquée aux plantations forestières. Ce chef d’entreprise avisé se passionne pour les essences rares tel le chêne à feuilles de châtaignier qu’il a ramené du Caucase.

Quand il ne parcourt pas le monde en quête d’espèces végétales rares, Daniel Soupe coiffe sa casquette de dirigeant d’entreprises. Pour rencontrer cet homme occupé, il faut se déplacer dans le département de l’Ain, plus exactement à Châtillon-sur- Chalaronne, petit village situé à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Lyon. C’est là, entre Dombes et Bugey, qu’il conduit le groupe des pépinières Soupe, une entité spécialisée dans les végétaux et les arbres d’ornement.

L’homme est un entrepreneur avisé, à la tête de trois sociétés florissantes qu’il a patiemment bâties au long de quarante années d’expériences professionnelles. «Après une formation de pépiniériste, complétée en Suisse chez un paysagiste de Lausanne, j’ai créé mon activité en 1975 dans l’Ain en démarrant sur 0,30 hectare de terrain. » Aujourd’hui, le groupe des Pépinières Soupe dispose de 460 hectares dans la région. Avec une équipe de 90 salariés, l’ensemble annonce un chiffre d’affaires consolidé de 7 millions d’euros. Daniel Soupe n’opère pas comme un pépiniériste de base. Il a fondé le développement de ses entreprises sur l’innovation dans les secteurs de la production, de la plantation et de la commercialisation de végétaux. «Avec notre pôle Recherche & Développement, nous imaginons des éco-concepts innovants et efficaces touchant le secteur des espaces verts multifonctionnels en cherchant à dépasser le simple rôle ornemental. » Il s’agit ici d’une vision contemporaine naturaliste du paysage où l’ingénierie végétale tient une place centrale.

Le pépiniériste de l’Ain se considère comme un créateur de concepts apportant des solutions techniques aux architectes, paysagistes, jardiniers... Il cite quelques-uns des domaines innovants dans lesquels il intervient en appui aux maîtres d’œuvre : aménagement de berges, agencement de parcs ludiques, installation d’alignements urbains, création de protections et de clôtures végétales...

Passionné par la recherche d’arbres rares

Doué d’un esprit inventif et curieux par nature, Daniel Soupe parcourt le monde à la recherche d’arbres rares. «J’ai beaucoup voyagé pour trouver des espèces dites de collection et je pense avoir été en France l’un des pionniers de la démocratisation de ces essences que l’on plante aujourd’hui de façon très banale. J’ai été le premier, par exemple, à faire connaître aux Lyonnais Tetradium Danielli, l’arbre aux cent mille fleurs originaire des montagnes du nord de la Chine et de la Corée. »

Combien de pays a-t-il visités ? Trente, quarante ? Daniel Soupe ne les a pas comptés, son approche consiste en prospection de zones écologiques différentes et non en coups de tampon sur un passeport bien rempli. «J’aime partir sac au dos, découvrir des secteurs géographiques peu connus, fouiner dans les arboretums,dans les collections, aller sur le terrain, marcher, grimper, y compris et parfois dans les arbres pour collecter des échantillons. » Les explorations de Daniel Soupe demandent une préparation minutieuse en amont du voyage. « Pour évaluer les critères d’intérêt d’une espèce, je pars de l’existant, sans négliger les travaux déjà publiés par de brillants botanistes. » La littérature agronomique, les ouvrages botaniques, les congrès scientifiques, les sites Internet spécialisés..., tout est prétexte à découverte et à validation, ou non, d’une intuition ou d’une idée de départ.

BIO-dynamiser les plantations forestières

La diversité que prennent les formes naturelles des arbres motive grandement le pépiniériste. « Je suis attiré par les arbres sarmenteux qui ont un port naturel spécifique à l’espèce, tel l’écotype Margeride du pin sylvestre ou le pin Napoléon (Pinus bungeana), un résineux rarissime originaire de la région de Pékin et que je trouve somptueux avec ses troncs multiformes et son écorce squameuse allant du gris vert au rouge-carmin rappelant celle du platane. »

Cependant, l’esthétique ne constitue pas la motivation principale de cet amoureux de la beauté des arbres. « Ce qui m’intéresse, c’est plutôt l’adaptation d’une espèce à croître dans une situation qui peut être difficile, à résister aux attaques d’insectes, aux maladies et autres agressions. » Cette approche scientifique explique sans doute pourquoi Daniel Soupe a développé le concept de la bio-dynamisation contrôlée appliquée aux plantations forestières. « Il s’agit d’un service d’accompagnement des plantations forestières sur sols pauvres ou pollués, par l’introduction de micro-organismes. » Cette technique innovante identifie par analyse chimique les carences des sols et elle définit des corrections mettant en œuvre différents composants: broyats de branches, copeaux de bois, terreau et éventuellement des mycorhizes dont les actions sont renforcées par les effets d’un inoculum bactérien introduit dans le sol. De leurs côtés, les racines des plants reçoivent une solution renfermant des spores et des hydres d’un champignon endomycorhizien. « Cette composition fonctionne comme principe de la mycorhization assistée dynamisant la symbiose racines-mycorhizes. » Daniel Soupe précise que différents modes d’inoculation sont préconisés: semis et substrats par épandage, jeunes plants en racines nues par pralinage, plants en mottes par pralinage ou par aspersion, fosses de plantation par aspersion.

Découvreur de nouvelles essences

L’esprit fécond de Daniel Soupe ne semble s’accorder aucun repos. Les facultés d’adaptation des végétaux au réchauffement climatique l’intéressent beaucoup. Il cherche des essences capables de supporter de fortes amplitudes thermiques, des sécheresses sévères, des hivers très pluvieux... Le chêne à feuilles de châtaignier (Quercus castanei- folia) – auquel il croit beaucoup et qu’il veut propager – pourra-t-il apporter des réponses aux forestiers français ? Ce feuillu du Caucase à croissance rapide présente de multiples avantages. « C’est une essence très plastique capable de pousser dans différents types de terrain. Très résistant au stress hydrique, il n’a pas de maladies ni de prédateurs connus et il s’adapte particulièrement bien à l’atmosphère et aux sols urbains. Et bien sûr, insiste Daniel Soupe, il peut aussi être planté en milieu forestier. »

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